Les Femmes dans l'Industrie Musicale

Les Femmes dans l'Industrie Musicale

6 juil. 2022

L’industrie musicale n’a de cesse de créer et développer des nouvelles tendances comme des nouveaux moyens d’expressions, mais peine encore à prendre le train du progrès sur certains points. Si la place et le poids d’artistes comme Madonna, Aretha Franklin, ou Shay (à l’affiche de « La Nouvelle École », la nouvelle grosse production Netflix tournée autour de la détection de nouveaux artistes rap/urbain) est incontestable dans l’esprit de la plupart des consommateurs, la place des femmes dans l’industrie continue de poser de nombreux défis, et vaut la peine d’être abordée dans son ensemble. 

En effet, selon un rapport récent de Berklee’s Institute for Creative Entrepreneurship et de l’organisation Women In Music (WIM), aux États-Unis, 45% des femmes sondées ont affirmé que la discrimination de genre et le harcèlement sexuel étaient leurs plus grands défis dans l’industrie musicale. Il nous semble donc important de se pencher sur cet écosystème qui échange et s’influence, du haut de la pyramide (les instances dirigeantes) mais également à la base de son socle (les auditrices et consommatrices de musique) afin de nous questionner et de réfléchir ensemble à un monde musical plus inclusif et diversifié, pour le bonheur de tous les passionnés de musique.

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1. La place de la femme dans les récits

La place de la femme dans l’industrie musicale passe tout d’abord par sa présence et sa construction dans l’imaginaire collectif. L’objectification des femmes à travers les paroles ou l’expression musicale est assez fréquente dans les « standards » des artistes, tous genres et époques confondus. Aujourd’hui encore, les femmes possèdent une place importante en tant qu’inspiration, voire en tant que « muse ». Les titres de musique composés de prénoms féminins (Aïcha de Khaled, Marie de Johnny Hallyday) ou parlant explicitement de femmes (She’s Gone de Bob Marley, My Funny Valentine de Chet Baker) sont nombreux, et certains artistes masculins bâtissent même leur identité musicale autour de leurs relations avec les femmes. Si l’amour est indéniablement un moteur de création musicale et mérite d’être mis au premier plan, cette identité musicale pose question, notamment sur l’image d’une femme dominée, objectifiée et fantasmée qu’elle crée et nourrit. D’autres problématiques méritent également d’être questionnées ultérieurement, comme le cas de l’image des femmes non-blanches dans un monde de plus en plus métissé.

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2. La place de la femme en tant « qu’auditrice/consommatrice »

Ici aussi, le fait d’être une femme a une influence particulière sur les modes d’écoute et de consommation de la musique. En effet, le besoin d’identification et de représentation est important dans un secteur artistique, et si on peut assurer sans trop de mal que les femmes écoutent autant de musique que les hommes, on pourrait se questionner sur du ciblage inégal des musiques envers ces dernières. Certains genres musicaux encore très « masculinisés » peinent à donner une place affirmée à l'auditoire féminin. Le rapport à la « groupie » assez exacerbée dans le rock ou la pop qui conçoit la fan féminine comme ayant un intérêt uniquement sexuel pour les musiciens, la description des femmes dans les paroles des musiques rap ou pop, ou les abus des corps des femmes en concerts et festivals montrent encore une certaine décrédibilisation des goûts musicaux des femmes, et que des progrès peuvent être faits pour donner une place plus égale et inclusive aux femmes. 

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3. La place de la femme en tant que « créatrice/développeuse »

Les chanteuses et créatrices musicales sont de plus en plus nombreuses et accèdent de plus en plus facilement au même succès que leur homologue masculin, en témoignent les phénomènes Beyoncé, Taylor Swift, ou plus récemment Dua Lipa ou Aya Nakamura. Elles donnent donc un repère important pour la communauté féminine, avec des messages forts (« Run The World (Girls) » !) et permettent de créer des modèles pour les futures artistes féminines. 
Cependant, certains rapports, comme celui réalisé par Dr. Stacy L. Smith, montrent encore une certaine sous-représentation des femmes dans les métiers de la musique : sur 900 chansons populaires, on retrouve 1 femme pour presque 4 hommes. Le constat est encore plus criant dans les métiers de la production, où sur un échantillon de 600 chansons populaires, il y avait 1 productrice pour 38 producteurs. Des chiffres révélateurs d’une industrie où plus de la moitié des titres à succès ne comptent aucune femme dans leur processus de composition.

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4. La place de la femme en tant que « dirigeante »

En 2021, la nomination de Marie-Anne Robert à la tête de Sony Music France, qui fait écho à celle de Pauline Duarte à Epic Records France, montre un certain progrès dans l’accès des femmes à des fonctions dirigeantes, mais aussi une réalité : seulement 10% des entreprises musicales en France sont dirigées par des femmes. « Les choses progressent mais il y a encore du chemin à parcourir. Nous sommes 60% de femmes étudiantes en musique, mais uniquement 35% de femmes de plus de 40 ans dans les entreprises de musique. […] On a un vrai manque de représentativité. » disait cette-dernière au micro de France Inter.

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La suite ?

Après avoir fait un bref tour d’ensemble de la place de la femme dans l’industrie musicale et montré les écarts de genre à tous les niveaux, il nous faut tirer les conclusions suivantes : l’industrie se doit de se mobiliser pour apporter une parité de genre. « Plus notre industrie musicale sera inclusive et diverse, plus elle sera créative et puissante » disait Marie-Anne Robert. Les voix se multiplient et proposent des solutions d’inclusivité, comme des festivals s’engageant à respecter la parité de genre dans leur programmation. Ainsi, le développement d’organismes et d’artistes féminines plus engagées et porteuses d’un réel message d’inclusivité se développe, permettant de construire une identité propre à la communauté. 
Les institutions publiques et les entreprises privées mettent également en place des dispositifs pour aller dans la voie de la parité, comme le Centre National de la Musique, dont l’une des nombreuses missions est de favoriser un accès égal des femmes et des hommes aux professions de la musique, et qui a publié en décembre 2020 un protocole de lutte contre le harcèlement sexiste et les violences sexuelles, ou la FELIN (Fédération Nationale des Labels et Distributeurs Indépendants), qui est à l’origine du programme MEWEM (Mentoring Program for Women Entrepreneurs in Music Industry). Objectif : mettre en relation des femmes souvent dirigeantes dans la musique avec de jeunes entrepreneuses pour accélérer des carrières. 
Chez Diggers Factory, nous nous intéressons énormément aux initiatives qui prônent la parité des genres dans l’industrie musicale, comme le font les organismes KeyChange ou SheSaidSo, et nous nous engageons à respecter une stricte parité des genres dans la programmation des artistes de chacun de nos évènements, pour avoir un impact à notre propre échelle. Nous cherchons constamment à mettre la lumière sur des projets inclusifs, qui sauront nourrir la diversité de la scène musicale française et internationale !

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