Pour habiller la voix langoureuse de la chanteuse sur les cinq titres de son premier EP à venir, il fallait des musiques à la hauteur : amples et cinématographiques, tout en contrastes vertigineux, ombre et lumière mêlées, entre trip-hop et chant d’opéra, lyriques envolées de violons à la Angelo Badalamenti et vibrato de guitare à la « Bang Bang ». Chaque titre est un petit film à lui tout seul. Lynchien, comme « (it could have been) love », dont le clip tourné dans les décors de western, naguère fréquentés par Tarantino ou les frères Coen, d’Almeria, en Andalousie, ajoute encore au mystère. Romantique, à l’instar de « Plonge », plongée dans les abysses de l’anxiété, au clip, par contraste, ensoleillé. Noir, comme « Hypersexual », qui traite de l’hypersexualisation, encore trop souvent exigée, de la part des majors, des artistes féminines. Ou encore fellinien, tel le baroque « Amore Sacro », qui donne son titre à l’EP. L’opus s’achève sur « Brest », une sublime ballade hantée avec cordes et piano.
Il est des voix – elles sont rares – dont on tombe instantanément amoureux·se. Celle de Mathilda, d’une nonchalance vaguement désabusée, faussement boudeuse, a une profondeur de champ inédite qui nous fait basculer dans un monde frémissant et sensuel dont elle seule possède les secrets. On pense à Lana Del Rey, bien sûr, avec qui elle partage une adoration pour Nancy Sinatra, les actrices 60’s, les films de Lynch et la témérité de ne jamais lutter contre la tristesse et la mélancolie. Avec Mathilda, aussi à l’aise dans les graves frissonnants que dans les aigus aériens, le chant se fait poème, prière, sortilège.